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Les mémoires de Julien Pierre SOUDRY - Partie 2 : La virée de Galerne (octobre-mars 1793)

Index de l'article

 soudry3C’est ici où commencent nos plus grands malheurs. A peine venions nous à Ingrandes d’apprendre les détails de l’affaire de Montjean, l’alarme s’est répandue tout à coup que les brigands avaient passé la Loire dans la même nuit de Saint Florent à Varades par la lâcheté du Commandant qui était en garnison à Varades (on dit qu’il s’appelait HOG) avec 600 hommes et 2 pièces de canon. Ce n’était que malheureusement que trop vrai. La garnison de Varades s’était repliée à Ancenis. Dans le courant de la nuit, les brigands, qui étaient à Saint Florent, firent un tapage terrible ; pendant ce temps ils avaient préparé leurs bateaux et le passage se fit dans l’île Mocquard. Ils abordèrent en grand silence sur la rive droite de la Loire et montère  nt de suite à Varades. La centaine de citoyens qui étaient de La Varenne, ont eu à peine le temps de se sauver et d’apprendre la nouvelle à Varades à la garnison. Les citoyens se précipitèrent à Ancenis.

FLASH :Battus devant Cholet, les Vendéens passent la Loire le 18 Octobre à Saint Florent le Vieil. Ils vont vers Granville où ils espèrent l’aide anglaise, puis refluent vers Pontorson.

Le passage de la Loire de Saint Florent à Varades resta libre pour les brigands. Ce n’était pas suffisant : il fallait pour eux qu’il le fut en plusieurs endroits. Ils tombent de suite sur Ancenis le vendredi 18 Octobre pendant qu’une partie de leur armée était sur la rive gauche vis à vis d’Ancenis, avec une forte artillerie qui faisait un feu continuel. Les occupants de la garnison d’Ancenis sont obligés d’évacuer et de se replier sur Nantes. Monsieur BONCHAMP DE LA BARONNIERE avait été blessé mortellement à Beaupréau. Transporté à Saint Florent et désespéré de tout le monde, il demanda aux autres Généraux de l’armée catholique et royaliste, la grâce des prisonniers patriotes qui étaient prisonniers à Saint Florent et au château de la Mauvaisinière. Elle lui est accordée. Il est mort dans les parages de l’île de La Meilleraie et enterré à Varades.

TABARY, adjudant général, arrive à Ingrandes au soir du 17 Octobre. Dans le courant de la journée on battit la Générale et tout le monde se mit sous les armes. La municipalité,, Monsieur ALLARD, chirurgien, Maire, Monsieur LEBOEUF de la verrerie, président du comité de surveillance, et le Commandant CHEVALLIER ont donné des ordres pour faire une sortie. Aussitôt les habitants d’Ingrandes avec leurs drapeaux, tous armés de fusils, piques, brocs, et fourches et 100 hommes du Bataillon de la Sarthe, qui composaient pour lors toute la garnison, avec deux pièces de canon, et quelques gendarmes, se mettent en marche sur le chemin de la Riottière. On était arrivé ; il ne fut tenu aucun ordre militaire. L’adjudant CHEVALLIER avait envie d’évacuer tout et de partir d’ici. Plusieurs habitants d’Ingrandes lui firent des reproches, BERTAUD et Julien DUBOIS le traitant de lâche et qu’il pouvait aller se faire foutre avec ses canons, que, pour eux, ils ne désempareraient pas. Il se passa plus d’une heure sans prendre parti ; nous étions sur le grand chemin de la Riottière comme des moutons qu’on conduit à la boucherie. Les gendarmes avaient attaché leurs chevaux aux grilles de l’auberge de Saint Julien, les volontaires se répandaient dans les vignes pour manger des raisins. Les habitants et les gendarmes s’amusaient à boire, le Commandant de la Garde Nationale, Monsieur de FAYOT, l’adjudant CHEVALLIER, le procureur de la commune, Monsieur MOUNIER, chacun causait à sa guise. Enfin il fut proposé de faire deux patrouilles du côté de Varades avec la Garde Nationale de la Rue du Fresne, en Bretagne, pour aller à la découverte. (La Rue du Fresne était un quartier éloigné du bourg de Montrelais, bordant la Loire, mais limitrophe d’Ingrandes. C’est une rue qui en faisait la limite et par-là même celle de la province de Bretagne et celle d’Anjou. Cette frontière fut longtemps très importante pour l’imposition de la gabelle les conditions de la Bretagne étant très avantageuses par rapport à l’Anjou, d’où la contrebande).

Les habitants furent les premiers à cheval, les gendarmes les suivirent, l’adjudant CHEVALLIER à leur tête. Ils partent sur la grand’route et à une portée de fusil de Varades, ils aperçoivent dans un fossé un pauvre volontaire, qui était parti le matin pour aller à Ancenis et qui venait d’être massacré par les brigands. Deux hommes de campagne, qui étaient dans les champs à travailler et à qui ils demandèrent s’ils avaient vu des brigands, leur dirent que le nommé LATOUR, de la mine à charbon, à la tête de plusieurs cavaliers, s’était promené dans le grand chemin et était venu jusqu’à l’Arche du Brais. C’est toute la découverte qu’ils firent et s’en revinrent à la Riottière, où nous étions toujours dans le grand chemin.

A nos côtés, la garde nationale forme un détachement et une patrouille du côté de Montrelais. Des volontaires du bataillon de la Sarthe en firent une autre, il fut distribué des cartouches, qui arrivèrent dans une voiture dans un baril, à tout ceux qui en voulurent, ensuite le restant du baril fut déposé dans une chambre à la Riottière, à l’auberge Saint Julien. Le détachement, organisé à Montrelais, au nombre de 80 hommes du Bataillon de la Sarthe, à destination d’Ingrandes, vint nous trouver à la Riottière. Après que toutes les patrouilles furent revenues, des ordres furent donnés que chacun retourne à son poste. Nous rentrons à Ingrandes sur les quatre heures du soir.

Ce 18 octobre 1793, à la pointe du jour, une patrouille de cavalerie partie d’Ingrandes, pour aller du côté de Varades, s’est avancée trop avant. La cavalerie des brigands qui les observait cherchait à leur couper le chemin. Ils se sauvèrent à la hâte, à l’exception du fils LECERF de Champtoçé, dont le cheval s’abattit, et il fut fait prisonnier par les brigands. On rapporta à Ingrandes, quand la patrouille fut rentrée, que LECERF et plusieurs autres avaient été tués, que les brigands avaient une bonne cavalerie et que nous n’étions pas en sûreté. Sur les onze heures du matin, les brigands, sur la rive gauche de la Loire, ont dirigé leur artillerie sur la ville d’Ingrandes. Ils avaient deux ou trois pièces de canon qui tiraient continuellement, un coup n’attendait pas l’autre. Ils appointaient toujours le plus du côté du Mesurage ; on ne pouvait passer sur l’Arche Dorée et la levée de l’étang sans courir les plus grands risques.

Ce jour là, Monsieur BRICE, Aubergiste à l’Arche Dorée, étant à la porte, fut blessé d’un coup de canon qui lui emporta les deux talons, CHARRIER, chapelier, eut son canon de fusil faussé par un coup de canon, en passant sur la levée de l’étang. A l’instant où j’y suis passé, j’ai vu un boulet de canon rouler près de moi au bas de la levée ; le coup avait porté dans l’empattement. Deux autres coups sont tirés de suite, les boulets ronflèrent à côté de grand nombre des habitants d’Ingrandes et de la Rue du Fresne, ainsi que de quelques femmes et enfants chargés de ballots qui sont restés jusqu’à deux ou trois heures de l’après midi. Il est arrivé à Champtoçé un détachement d’environ 800 hommes de troupe avec deux pièces de canon pour venir à Ingrandes. C’est TABARY, dont j’ai déjà parlé, qui commandait à Ingrandes et était arrivé à Champtoçé avant nous avec sa putain. Elle était là à donner des ordres au canonnier de la garde ( il y avait un canon braqué sur le grand chemin) et était habillée en homme. Nous avons erré longtemps dans le bourg de Champtoçé ; après, la troupe s’est mise en mouvement, nous avons fait la route d’Ingrandes où nous sommes arrivés vers les quatre heures. Nous n’étions pas plus tôt arrivés que le bruit se répand que l’armée, qui avait fait sa position à la Riottière, se repliait encore sur Champtoçé, et que les brigands approchaient d’Ingrandes. Quel parti prendre ? J’ai « pouint » balancé à me décider, le matin que "j’avais parti", j’avais regretté de ne pas avoir emmené ma femme et mes deux enfants, mon garçon âgé de 7 ans et demi et ma fille âgée de 3 ans. Eh bien j’assemble ma famille et leur dit le dessein que j’avais de partir et de les emmener avec moi, je n’en dis pas davantage et mon épouse me donna la preuve du sincère attachement qu’elle avait pour moi. Nous partons, nous abandonnons tout, nous prenons ma femme et moi chacun un de nos enfants par la main portant un petit pot où il y avait du beurre et un « pein » de six livres. Ma femme avait un petit ballot et nous arrivons la nuit à la Joubarderie, à un quart de lieue d’Ingrandes, sur le chemin de Champtoçé. Nous demandons le logement en payant pour la nuit à Veuve ROUAULT, fermier de ladite closerie et qu’elle nous accorde. Après que je crus ma famille en sûreté, je fus faire un tour sur le grand chemin du côté de la Villeménard. J’y trouve une partie de la garde nationale d’Ingrandes et plusieurs volontaires. Nous concertâmes ensemble pour faire la garde sur tous les chemins et bivouaquer toute la nuit pour ne pas nous laisser surprendre. Cela fut très mal exécuté, il n’y avait pas d’ordre, les uns voulaient d’une façon, les autres de l’autre, plusieurs dirent « nous voulons retourner à Ingrandes », les autres « à la Riottière », les autres « à Cha  mptoçé », et chacun se disperse. Pour moi je reviens à la Joubarderie où je couchais dans le grenier sur la paille avec les citoyens CHENEAU, tonnelier, COUGEON, marinier.

Le 19 octobre, nous revînmes à Ingrandes où à peine nous fûmes arrivés que le bruit se répandit que les brigands étaient à la Riottière en très grand nombre et que nous n’étions pas de force à leur résister, que nous étions perdus si nous restions plus longtemps. Cela ne m’empêchait pas de dire que tout cela allait très mal, que si les brigands avaient doublé leurs forces comme ils pouvaient le faire puisque ce n’était que leur avant garde qui nous donnait la chasse, ils auraient pu, ma foi, rentrer à Angers. C’est comme l’adjudant général TABARY qui s’est très mal comporté dans cette affaire, il a été guillotiné à Angers avec sa putain. Durant cette bataille, le bonhomme SOUDRY s’est sauvé et s’est retrouvé à Angers. Le dimanche nous nous sommes retrouvés sur le port Ligny ; nous trouvâmes bien une dizaine d’habitants d’Ingrandes. Pierre BOURSIER qui était soldat, et qui avait un grade, nous procura du pain « d’amunition » ; il n’était pas commode d’en trouver pour de l’argent.

Le lundi 21 octobre, nous apprîmes ainsi, à Angers, la fâcheuse nouvelle des habitants, nos concitoyens et des soldats volontaires, qui ont été tués dans la déroute du samedi 19 depuis Ingrandes jusqu’à Saint Georges. On compte 15 habitants d’Ingrandes dont voici les noms : CHABIN père, tailleur, ROBERT père, marinier, Jacques DEFLANDRE ou DEFLANDE, POIPHETON, BODET, BOUET Serge, BOISSARD, porteur de lettres, CHOGOFSE fils, tailleur, CHARRIER, chapelier, BOUCHEREAU, marinier, POUZET de la mine, MARTIN Jean, sabotier, HAMELIN, mort de ses blessures, VERGE, PERDRIAU, huissier, et trente soldats volontaires, presque tous du bataillon de la Sarthe. "Nous ont dit" aussi à Angers que les brigands n’avaient fait aucun mal à la ville d’Ingrandes, à l’exception de quelques maisons où ils avaient pillé.

Les brigands, après avoir passé la Loire à Varades et entrés à Ingrandes le samedi 19 Octobre 1793 sur les neuf heures du matin en sont sortis le lendemain dimanche à peu près à la même heure. C’est l’avant garde qui nous avait donné la déroute le samedi après avoir poursuivi nos citoyens jusqu’à trois lieues d’Angers sur la grand’ route, qui est revenue à Ingrandes le dimanche matin pour rejoindre la grande armée. Ils sont tous partis avec grand empressement suivant la route de Candé, de sorte qu’à dix heures du matin il n’en restait pas un à Ingrandes. Ils ont fait dire la messe avant de partir ; il est étonnant la quantité de monde qu’il y avait ; le chemin, les rues et les maisons étaient plein d’hommes, de femmes et d’enfants et tous avaient l’air bien triste et bien démonté, ayant été forcés comme nous d’abandonner leur pays, la Vendée, dans la crainte de tomber au pouvoir de l’armée des citoyens qui ne faisait grâce à personne et qui tuait tout sans exception, hommes, femmes enceintes, en  fants à la mamelle, vieillards, et mettait le feu partout.

J’arrivais à Ingrandes sur les cinq heures du soir, avec une douzaine de mes concitoyens. Notre armée marchait devant nous ; elle avait allumé son camp d’une immense flamme. Ils étaient à la Riottière comme nous arrivions à Villeneuve. Les vendanges n’étaient pas encore toutes faites et les soldats entraient dans les vignes et ont fait un tort considérable.

Pendant que j’étais parti à Angers, ma femme, se sauvant des brigands arrivant à Ingrandes, elle partit pour la Joubarderie avec son fils et sa fille en emportant un ballot. Tout le long du chemin elle eut peur ; elle rencontra des brigands dans un chemin mais qui la laissèrent passer. Les brigands arrivaient en foule à Ingrandes et disaient qu’ils entreraient d’autorité dans toutes les maisons qui seraient fermées et y feraient le pillage. La mère ROCHARD et ma sœur s’étaient beaucoup inquiétées pour ma femme. Enfin, notre sœur aînée, Françoise ROCHARD, eut la hardiesse de venir seule chercher ma femme et mes enfants à la Joubarderie en lui disant de revenir à Ingrandes et que les brigands ne faisaient de mal à personne. Nous logeâmes chez nous quatre hommes de l’Armée catholique et royaliste. Ma femme m’a dit qu’ils étaient très honnêtes et qu’elle n’avait pas eu à s’en plaindre. Ma sœur vint coucher cette nuit là avec ma femme et elles eurent grand peur dans le courant de la nuit, une patrouille de brigands frappait à toutes les portes en disant « ouvrez les portes, nous ne voulons pas qu’elles soient fermées ». Il fallut obéir, se lever, ils étaient les maîtres mais ils avaient bien peur d’être surpris. Ils partirent, comme je l’ai dit le dimanche au matin, et prirent la route de Candé.

FLASH : Le 12 décembre 1793 les Vendéens sont battus devant Angers et Le Mans. Le 23, c’est l’écrasement final de ces derniers devant Savenay. La valeur de l’assignat se réduit à zéro.

En décembre 1793, on me fait appeler pour aller au Comité de surveillance dont je faisais partie. C’était mon cousin ROUSSEAU, sabotier, qui me demandait. Je me rendis au comité où je trouvai le citoyen LANGEVIN, membre du comité, REVERRIER, fils aîné, commandant la garde nationale et deux hommes inconnus. Lesdits citoyens me dirent que les deux chouans (les inconnus) étaient deux brigands qui se rendaient volontairement. On les interrogea. Ils nous dirent que l’armée des brigands était dans le plus grand désordre, que tout le monde se dispersait chacun de son côté et que plus de deux ou trois mille de leurs camarades avaient abandonné ladite armée et se portaient dans les campagnes sur la route d’Ancenis à Angers avec le plus grand désir de se rendre aux municipalités et qu’ils étaient retenus par la crainte qu’on ne les fit mourir, et ceux qui formaient la masse de l’armée des brigands se portaient actuellement du côté du nord pour gagner la Basse Bretagne. Environ une trentaine de cavaliers étaient sur le chemin de la Riottière qui désiraient se rendre. C’était ceux qui étaient déjà entrés en ville et sur la demande qu’ils avaient faite s’il y avait de la troupe à Ingrandes, les femmes leur avaient dit oui e  t qu’il arrivait souvent des patrouilles de hussards, ce qui leur fit peur et les empêcha d’entrer en ville.

Nous ne savions ce que nous devions croire de tout cela, il ne faut pas se fier à son ennemi. Nous leur fîmes donner à boire et à manger et ils restèrent la nuit dans la chambre du Comité autour d’un bon feu. Pour moi, je m’en fus coucher dans la chambre de la citoyenne COUSSELON. Le citoyen LANGEVIN et PATRICE, le cabaretier, furent assez hardis pour aller en pleine nuit sur le chemin de la Riottière. Ils entendirent du monde et des chevaux ; ils crièrent à une certaine distance « Camarades ! rendez-vous ! venez à Ingrandes, vous n’aurez pas de mal ! ». La petite troupe de brigands s’avance, arrive à Ingrandes avec les deux citoyens susdits qui les conduisent au comité de surveillance. Ils étaient environ quarante avec armes, bagages, chevaux, valises, fusils, sabres et pistolets qu’ils déposèrent volontairement au dit comité et dirent leurs noms qui furent portés sur les registres. Les chevaux furent mis à l’écurie de l’auberge de la Fauvette, les hommes couchèrent comme ils purent, les uns dans les champs, les autres dans les greniers. Ils confirmèrent ce que les deux autres brigands avaient dit : que l’armée était foutue et qu’ils n’en pouvaient plus de misères et de fatigue. Je ne dormis presque point toute la nuit et je sortis à la pointe du jour et je me rendis trouver le citoyen LANGEVIN qui me conta ce qui s’était passé dans le courant de la nuit. Je m’en revins bien joyeux apporter cette bonne nouvelle à ma femme et aux voisins et 400 brigands se rendirent. Cela ne finissait point, il arrivait chez nous environ 400 brigands qui couchèrent dans l’église et nous en envoyons 10 à Saint Florent, par eau, au Général MOULIN sur la demande qu’il nous avait faite pour, disait-il, en tirer des renseignements.

Un homme vint le même jour d’Angers, représentant le représentant du peuple FRANC-CASTEL, pour f  aire partir de suite et conduire à Angers, au Comité révolutionnaire, tous les brigands qui se trouvaient sur la commune. C’est Gabriel MORIN qui en était porteur. Ce MORIN était commissaire du pouvoir exécutif ; c’était un scélérat, un homme terrible, digne agent du représentant du peuple FRANC-CASTEL. Il voulait de suite emmener les brigands à Angers pour nous donner le temps de rapporter notre procès-verbal, ce à quoi nous nous sommes opposés. MORIN était bien porteur de l’ordre du représentant du peuple mais pas nommé par ledit ordre commissaire pour l’exécution.

Il y avait avec lui plusieurs hussards qui arrêtèrent dans les chemins les brigands qui se rendaient à Ingrandes et leur ôtaient leur portefeuille, argent et montres etc… Même dans l’église, ils troublèrent nos opérations par le bruit qu’ils faisaient pour ôter les montres, portefeuilles, argent aux brigands. Il est étonnant le butin que les hussards ont fait sur les brigands qui se sont rendus à Ingrandes. Nous les fîmes cependant sortir de l’église et l’un d’eux, condamné, fut conduit au corps de garde. Le commissaire MORIN aperçut un petit bateau à terre entre les quais ; il n’y avait personne à garder ledit bateau. Ici, ledit MORIN fit un tapage du diable et dit que l’on laissait les bateaux à terre pour favoriser le passage de quelques brigands dans la Vendée et dénonçait au représentant du peuple à Angers la municipalité et le comité de surveillance d’Ingrandes. Il partit le soir même pour retourner à Angers, et, le lendemain matin il arrivait à Ingrandes avec un ordre, qui était du représentant du peuple, pour prendre les informations contre les fonctionnaires publics qui n’avaient pas rempli leur devoir de faire conduire de suite à Angers tous les brigands qui s’étaient rendus à Ingrandes.

D’après les informations faites par ledit MORIN, commissaire, sur les fonctionnaires publics de la commune d’Ingrandes, elles n’ont pu que leur être avantageuses n’ayant jamais cessé de remplir nos devoirs avec la plus grande exactitude, de sorte que cela est tombé de soi-même et n’a eu aucune suite. Quant au sujet des brigands, MORIN a emmené avec lui, ce jour là, tous les brigands qui se trouvaient à Ingrandes et les fit conduire à Angers par la garde nationale.

A compter du dix neuf décembre 1793, le commissaire MORIN fait plusieurs voyages en emmenant toujours avec lui les brigands qui s’y trouvaient. En l’espace de huit jours, il s’est rendu à Ingrandes, environ sept à huit cent brigands avec 75 chevaux et un fort mulet, qui ont été envoyés à Angers. Au nombre des brigands, qui se sont rendus à Ingrandes, se trouvait le petit CESBRON, fils de négociant à Chemillé, âgé de 12 à 14 ans. Le citoyen MONNIER, procureur de la commune d’Ingrandes, l’emmena chez lui sous sa responsabilité et écrivit au comité révolutionnaire d’Angers. MORIN, qui en avait connaissance, dit que ses pouvoirs étaient au-dessus du comité révolutionnaire et persista pour emmener le petit CESBRON et donna réquisition au comité de surveillance d’Ingrandes pour le faire partir de suite. Nous avions dans ces temps là un représentant du peuple dans nos départements, savoir, à Angers, FRANC-CASTEL, à Nantes, CARRIER. C’était deux monstres dont la conduite abominable fait horreur : ils ont fait fusiller et noyer par milliers, et sans examen des hommes qui se rendaient avec le repentir et la confiance, et dans l’espérance du pardon, des femmes enceintes, des enfants de trois mois, etc… etc…

Le dernier décembre 1793, il s’est rendu à Saint Florent environ 1200 brigands. Le représentant du peuple, FRANC CASTEL d’Angers les envoya chercher et les fit fusiller dans la plaine de Saint Gemmes, sur les bords de la Loire. Après les fusillades, les soldats les dépouillèrent tout nus pour voir s’ils avaient de l’argent caché et jetaient les cadavres dans la Loire. Il en a « baissé » jusqu’à Ingrandes. Trois ont été enterrés dans les sables le long de l’île du Mesurage. Tous les brigands qui se sont rendus ont été conduits à Nantes ou Angers, ont été fusillés ou noyés, les enfants mâles de l’âge de 12 à 15 ans ont été embarqués sur plusieurs vaisseaux pour servir de mousses.

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